Articles parus dans Science et Vie Juniors n° 181 sous la plume de Pierre Lefèvre
Des paysages défigurés
 
Chambre avec vue... sur voie rapide  
Aux Etats-Unis, depuis plus d'un demi-siècle, tout a été pensé en fonction de la voiture : la forme des villes et des banlieues, l'implantation des emplois, des commerces, des loisirs. Tout s'étale démesurément parce que chacun est supposé disposer d'un moyen de transport individuel. Résultat, pour faire circuler leurs 214 millions de voitures, les Etats-Unis entretiennent 6,3 millions de kilomètres de route, de quoi faire 157 fois le tour de la Terre ! Les routes et les parkings utilisent la bagatelle de 160000 km2, la moitié de la superficie de l'Italie (1) !
Des montagnes de carcasses
L'élimination des vieilles voitures pose des problèmes de stockage et de recyclage. En Europe, 8 à 9 millions de voitures sont mises à la feraille chaque année (2). Or si les trois quarts des matières premières (principalement des métaux) composant les voitures sont recyclés ou réutilisés, un quart (surtout des matières plastiques) ne l'est pas. Ainsi, 2 millions de tonnes de matières plastiques aboutissent dans les décharges (2). Des sites de décharge qui non seulement deviennent rares et chers, mais qui ont des effets nocifs sur l'environnement.
Des panneaux publicitaires à profusion
Le développement de l'usage de la voiture a également eu des conséquences sur notre environnement visuel. La physionomie de la périphérie de nos villes a changé, offrant désormais partout le même spectacle désolant : une succession de grandes surfaces entre lesquelles se déploient, par centaines, des panneaux publicitaires.
Sources : (1) Earth Policy Institute. (2) CEE Recherche.

 

 

Article paru dans Science et Vie Juniors n° 181 sous la plume de Pierre Lefèvre
Macadam massacre

La route est l'un des fléaux sanitaires majeurs de la planète : 1,2 million de personnes (1) meurent chaque année dans les accidents de la circulation. presque le nombre de français morts durant la Première Guerre mondiale. Les accidents de la circulation fauchent davantage les enfants et les jeunes. Ils constituent la deuxième cause de mortalité chez les 5 à 29 ans (1). Et dans cette tranche d'âge, ce sont surtout les adolescents et les jeunes adultes qui laissent leur vie dans cette guerre routière permanente. Si les pays riches connaissent une baisse de la mortalité ces dernières années, en revanche, rien de tel dans les pays pauvres, les chiffres devraient doubler d'ici 2020 (1).

La mobilité qu'offre la voiture se paie au prix fort : celui du sang. Pour l'Europe, 40000 morts chaque année (2) et 150000 handicapés (1). Une équipe de chercheurs de l'Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité (Inrets) a suivi en Rhône-Alpes le sort de 43000 accidentés de la route. Conclusion : une personne sur trois conserve des séquelles. Parmi ces traumatisés, 13000 s'en sont tirés avec des maux de têtes atroces réguliers, des douleurs au cou ou à l'épaule. Pas toujours facile de reprendre une vie normale avec ce handicap qualifié pourtant de léger. Une toute petite partie des accidentés, 300, a eu des séquelles très graves : la moitié ou la totalité du corps paralysé, des membres amputés, des troubles sérieux du comportement comme ne plus savoir parler ou ne plus comprendre les mots.

Les accidents ont aussi un coût financier très lourd : coût des frais médicaux, des allocations ou du manque à gagner pour perte d'activité, des aménagements pour la handicap. Coût annuel dans l'Union Européenne : 180 milliards d'euros, soit deux fois le budget annuel de l'Europe (1) ; 65 milliards d'euros pour les pays les plus pauvres, ce qui dépasse la totalité de l'aide au développement ; et 518 milliards pour le monde, l'équivalent de la richesse produite chaque année par l'Inde.

Des fous du volant qui croient savoir conduire mieux que les autres

Mais qui sont ces délinquants du volant qui enfreignent sans sourciller le code de la route ? Regardez autour de vous. Ce peut être un voisin, vos parents, ou votre charmant profs de maths. Les chauffards peuvent être des gens tout à fait fréquentables dans la vie de tous les jours. Ainsi, jusqu'en 2002, avant la multiplication des radars, "80% des 35 millions de conducteurs ne respectaient pas la limitation de vitesse, souligne Jean-Pascal Assailly, psychologue à l'Inrets. Le délit devient la norme".

Selon Claudine Perez-Diaz du CNRS, qui a travaillé sur le comportement des conducteurs, les fous du volant se rangent en deux catégories.

Les premiers sont les "individualistes". Une fois dans leur voiture, ils se transforment en bête hargneuse, vociférant des insultes et insanités. "Feux orange, je passe, ligne blanche, je double, vitesse limitée, je fonce" pourrait être leur devise. Pourquoi ces gens se transforment-ils en loup une fois au volant ? Parce que dans leur voiture, ils sont chez eux, et ne suivent que leurs propres règles. Et ce qui est valable à l'intérieur de leur véhicule est valable aussi pour la route sur laquelle ils circulent. Bref, ils ne veulent tout simplement pas admettre que leur voiture roule sur une voie publique soumise à des règles communes à tous : le code de la route. Cela les rend malades. Car ils se sentent les meilleurs, les plus forts. Ils aiment le risque qu'ils pensent parfaitement maîtriser. Pour eux, ce sont toujours les autres qui ne savent pas conduire. Pas question donc de respecter des règles qui sont prévues pour les autres, les maladroits du volant. Au fond, ce comportement n'est pas étonnant : nos sociétés occidentales valorisent la compétition, la vitesse dans tous les domaines de la vie privée et professionnelle. "On retrouve sur la route ce que l'on valorise ailleurs : l'individu "performant"", souligne Jean-Pascal Assailly.

A l'opposé des "individualistes", les "fatalistes". Pas méchants pour un sou, ils n'en sont pas moins tout aussi dangereux. On les trouve parmi ceux qui subissent des ordres imposés, les exécutants, les ouvriers, et parmi ceux qui se sentent exclus de la société : divorcés, célibataires malgré eux, chômeurs... Ils n'ont le plus souvent pas une image très positive d'eux-mêmes. Ils accordent finalement assez peu de prix à leur existence. Ils remettent leur vie, et celle des autres automobilistes qu'ils menacent, au jugement de Dieu, ou au hasard. Pour eux, ce qui doit arriver arrivera. Cela ne dépend pas d'eux. Alors pourquoi faire attention ? Et quand ils ont un accident, c'est la faute à pas de chance, non pas au feu rouge qu'ils ont "grillé", ou à leur vitesse excessive.

Sources : (1) Oms : Organisation Mondiale de la Santé. (2) Sécurité routière.

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